Ammonitrates : pourquoi les sénateurs ont-ils reporté leurs conclusions sur le stockage ?
20.11.2022
HSE

Depuis la catastrophe de Beyrouth, des sénateurs travaillent sur les ammonitrates. Ils ont rendu leur rapport cet été... mais n'y parlent pas de la question du stockage, alors que l'on sait que c'est particulièrement là que le bas blesse. Un second rapport est promis pour 2023. Le gouvernement gagne lui aussi du temps sur la question : un projet de décret a été ajourné sine die.
Dans un rapport d’information rendu en juillet 2022, les sénateurs Pascal Martin, Philippe Tabarot et la sénatrice Martine Filleul recommandaient de renforcer la surveillance des produits à base de nitrate d’ammonium dans le transport fluvial. Ils repoussaient en revanche de plus de six mois leurs conclusions sur le stockage de ces produits dans la chaîne logistique agricole. "Nous l’avons volontairement mis de côté ; il fera l’objet d’un deuxième rapport en 2023", nous explique Pascal Martin.
Pour mémoire, après la catastrophe de Beyrouth le 4 août 2020, les sénateurs de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable avaient lancé un cycle de travaux sur les ammonitrates. Ils avaient ainsi reçu les auteurs d’un premier travail sur le sujet : "Gestion des risques liés à la présence d’ammonitrates dans les ports maritimes et fluviaux" publié en mai 2021 par le CGEDD et le CGE.
Ce premier rapport interrogeait en particulier la pertinence de l’utilisation d’ammonitrates haut dosage (AN HD). Produits et utilisés en France, ils présentent un risque d’explosion supérieur aux mêmes engrais à dosage moyen. Les grandes installations de stockage de ces engrais sont correctement suivies, mais la situation des stockages sous déclaration "n’est pas sous contrôle", notaient les auteurs du rapport. Pour comprendre plus précisément la situation, ils recommandaient donc à l’inspection des installations classées de cibler ces installations dans leur programme 2021. Puis, pour encourager l’utilisation de matières moins concentrées, ils suggéraient d’abaisser les seuils de déclaration du stockage des AN HD.
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Auditionnés par le Sénat en février 2022 sur les résultats des contrôles, les services de l’État ont présenté des chiffres accablants. Sur 125 ICPE sous déclaration contrôlées, la DGPR (direction générale de la prévention des risques) a décompté plus de 550 non-conformités ayant conduit à 38 arrêtés de mise en demeure.
En parallèle, un projet de décret élargissant la déclaration en abaissant le seuil aux installations stockant plus de 150 tonnes d’AN HD (contre 250 tonnes de vrac ou 500 tonnes de big-bags actuellement) était soumis à consultation entre fin janvier et mi-février puis validé par le CSPRT le 15 mars. Mais le lendemain, Julien Denormandie annonçait dans son intervention sur les conséquences sur l’agriculture française de l’invasion russe en Ukraine "l’adaptation ou le report de mesures réglementaires pouvant impacter la disponibilité des engrais en 2022". "Le gouvernement a pris quelques mois de réflexion", commente Pascal Martin.
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Les industriels étaient particulièrement opposés à cette mesure. Lors de la consultation sur le projet de décret, ils ont notamment invoqué les risques pour la souveraineté industrielle française, pour sa souveraineté alimentaire, mais aussi l’absence d’étude d’impact.
"Nous avons besoin de disposer d’une étude d’impact économique globale et d’une photographie précise de la situation actuelle des sites de stockage", abonde Pascal Martin. Une seconde mission d’inspection a donc été demandée par le gouvernement au CGEDD et au CGAAER afin d’évaluer les conséquences économiques d’un abaissement des seuils de déclaration, mais aussi du régime d’autorisation. Ayant démarré ses travaux en juin, la mission doit rendre sa copie en décembre 2022 – au plus tôt. "Sur la base de ce rapport, nous pourrons poursuivre nos travaux, et écrire notre second rapport en 2023", prévoit le sénateur Pascal Martin.
Le premier rapport sénatorial de juillet 2022 se concentrait donc sur le transport fluvial, rejoignant les recommandations précédemment émises par le CGE et le CGEDD – tout en apportant quelques nouvelles suggestions. Les sénateurs proposaient ainsi d’inscrire dans le contrat d’objectifs et de performance de VNF (voies navigables de France) une mission d’observation et d’information en matière de transport de matières dangereuses, ou de préciser les responsabilités des services centraux dans une instruction conjointe.
Tout comme le CGE et le CGEDD, les sénateurs préconisaient la mise en place d’un règlement sur le transport et la manutention des matières dangereuses par voie fluviale. Lors de son audition devant le Sénat en février, la cheffe de bureau pour les affaires relatives au transport fluvial au ministère de la transition énergétique, Muriel Bouldouyré, avait annoncé le début des travaux sur le sujet en mars 2022.
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Hygiène, sécurité et environnement (HSE) est un domaine d’expertise ayant pour vocation le contrôle et la prévention des risques professionnels ainsi que la prise en compte des impacts sur l’environnement de l’activité humaine. L’HSE se divise donc en deux grands domaines : l’hygiène et la sécurité au travail (autrement appelées Santé, Sécurité au travail ou SST) et l’environnement.
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